Retour de la guerre

Emile H. Malet

 

 

La guerre déclenchée par la Russie et son Président autocrate Vladimir Poutine contre l’Ukraine fut présentée au départ comme un règlement conflictuel transfrontalier d’une puissance (Russie) cherchant à s’étendre aux dépens de son voisin (l’Ukraine) avec l’objectif fallacieux d’en « dénazifier » la population, en fait pour accomplir un rêve impérial tout aussi fallacieux de renouer avec les chimères d’une grande Russie. L’idéologie se mêlant à cette politique de conquête, il s’est agi de débarrasser l’Ukraine de ses dirigeants légitimes et de son histoire nationale. Avec de surcroit, la volonté de faire gober au peuple russe une fable conquérante nationaliste et faire avaler au reste de la planète cette longue litanie des mensonges poutiniens sur une Russie assiégée par l’Occident, au travers du bras armé des Ukrainiens – ces nouveaux cosaques !

 En fait, en lieu et place de protéger la minorité russophone du Dombass, l’armée russe fut déployée à l’enseigne du Z pour envahir un pays, après en avoir déjà annexé de larges contrées (Crimée et Dombass), en prélude à une monstration de sa toute puissance offensive renaissante. En somme, tenter de soumettre par la force d’abord le flanc ouest de l’Europe centrale et orientale et pour suivre narguer l’Union européenne et susciter une vague d’anti-occidentalisme au sein du concert des nations.

Si l’Union européenne, à la différence des Etats-Unis, fut surprise par cette invasion russe, c’est d’abord du fait de sa myopie politique. Comme disait Raymond Aron, elle ne pouvait envisager ce qui répulsait à ses yeux, surtout que de nombreux dirigeants européens avaient fait la courte échelle au dirigeant russe pour l’installer à l’égal des grands de l’Europe et du monde. On a feint de croire que Vladimir Poutine était dans la filiation du communiste réformateur Gorbatchev et du patriote libéral Eltsine, alors que l’homme avait pour carte d’identité le KGB – qu’elles qu’en soient les appelations – et pour mode d’action le renseignement criminel. Autant dire, que Poutine s’inscrivait plus dans un cadre de restauration tzaro-stalinien du pouvoir russe que comme un dirigeant éclairé et pacifiste.

Par chance, cette conquête de l’Ukraine s’avéra vite un fiasco par ce que la Russie de Poutine avait certes les moyens de raser la Tchétchénie et des villages syriens mais qu’elle ne disposait ni de moyens militaires ni d’une logistique guerrière à même de venir à bout d’une Ukraine résistante, patriote et regroupée majestueusement autour de son emblématique Président Volodymir Zelensky. Il y a aussi le concours militaire de l’Union européenne et des Etats-Unis pour soutenir l’effort de guerre d’une Ukraine qui défend son existence comme nation et la vie de sa population. Aussi, si rien n’est encore gagné pour l’Ukraine et si la Russie a échoué dans son pari initial, ce conflit constitue un bouleversement humain, par ses nombreuses victimes, et un tournant stratégique pour l’Europe. Désormais, et ne nous voilons pas la face par pusillanimité ou lâcheté, les meurtrissures de l’Ukraine sont le signe d’un retour de la guerre en Europe sciemment orchestré par Poutine.   

Nous ne sommes pas à la veille d’une troisième guerre mondiale par ce que nonobstant le désastre humain en Ukraine, la fantasmagorie criminelle de Poutine ne s’inscrit pas dans le registre génocidaire d’Hitler. Peut-être aussi, par ce que le mage kgbiste du Kremlin n’en a pas les moyens, peut-être aussi par ce que l’Occident dispose avec l’OTAN d’une riposte militaire supérieure. Quoi qu’il en soit, 2022 ne correspond pas à 1938 et Poutine ne s’offrira pas l’Ukraine comme le Troisième Reich s’empara des Sudètes avant de réduire à feu et à sang le reste de l’Europe. Mais d’ores et déjà, la Russie poutinienne – et quelle que soit l’issue du conflit ukrainien – a installé ce qu’on ne voulait plus voir en Europe et qui a les traits contraignants du temps de guerre. Des milliers de morts innocents, des destructions d’infrastructures, une guerre de l’énergie avec des pénuries et des hausses de coût insupportables pour les populations, une paupérisation accrue des classes moyennes, des poches de pauvreté, la dispute des céréales et autres denrées indispensables…

Ce temps de guerre survient après deux années de crise sanitaire qui ont sapé le moral et la joie de vivre des populations. Il n’est pas incongru de penser que c’est à dessein que Poutine a engagé ce pari démentiel avec l’arrière-pensée d’ajouter des contraintes aux contraintes, des clivages aux fractures sociales et in fine et à défaut d’accomplir son fantasme impérial de jeter le doute et la division au sein de l’Union européenne. Ce qui pour l’heure apparait comme une absurdité par ce que l’Europe semble avoir compris ce qui se joue en Ukraine. Mais la vigilance reste de mise par ce que cette guerre n’est pas finie et qu’elle éprouve nos valeurs, nos modes de vie, notre prospérité et notre quiétude.

Il me faut ajouter un additif qui n’est pas directement lié, quoiqu’on puisse y trouver une conséquence économique et financière de notre décision prise de ne plus imprimer par écrit – sauf exception éditoriale – la revue Passages. La trésorerie de l’ADAPes (éditrice de la revue Passages), fortement mise à mal exige cette transformation pour réduire les coûts. Nous continuerons à paraître à chaque trimestre à partir de 2023 dans une version électronique et nous transmettrons par WeTransfer la revue à tous nos abonné(e)s. Ce n’est pas sans un pincement au cœur et pour tout dire un rien de tristesse de devoir se distancer de l’écrit après plus de 36 années de publication. Cette émancipation par la technologie nous coûte sentimentalement mais nous garderons notre exigence éthique et notre ambition éditoriale. En espérant que vous continuerez à nous lire, toujours plus nombreux et à ce niveau le numérique à un effet multiplicateur, à nous accorder votre confiance et votre soutien financier indispensable à la poursuite de nos activités, nous vous souhaitons une bonne et heureuse année 2023. 

 

 

 

 

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